coucher de soleil sur un lac et vélo sur une navette fluviale
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Pour une ville à 30 km/h

4 octobre 2021

Il est bien connu que la baisse de la limite de vitesse à l'échelle d'un quartier contribue à rendre les rues plus conviviales. Quoique cette action seule ne suffise pas par elle-même, elle demeure une partie critique parmi l'éventail des transformations qui apaisent la circulation. Contrairement à ce que certains peuvent imaginer, le désir d'abaisser la vitesse ne vient pas d'une croyance dogmatique ou idéologique, prenant plutôt sa source dans des faits scientifiques.

Pour plus de survivants

La probabilité du mort d'un piéton dans une collision augmente rapidement si le véhicule en cause a dépassé les 30 km/h. C'est à la vitesse de 50 km/h que la survie à un impact est pratiquement impossible. La phrase à retenir : à 30 km/h, 10 % de décès, à 50 km/h, 10 % de survie. Il s'agit alors d'une multiplication des risques par neuf. Imaginons si on pouvait diviser par 9 le nombre de décès dû à la COVID-19 en prenant de simples mesures barrières! C'est à ça que notre gouvernement s'est engagé, et mis à part pour une poignée de complotistes, la population appuie ces mesures. Cela a sans doute sauvé des milliers de vies au Québec seul.

un graphique qui démontre que la vitesse tue
Données tirées de Ville 30.

Pour de l'air plus frais

Si c'est vrai qu'un véhicule thermique est plus efficace aux alentours de 60 ou 70 km/h, il faut avoir une vision plus large avant de proclamer qu'une baisse de la vitesse entraine davantage de pollution. En diminuant la cadence sur nos routes, on vient de réaliser deux choses : réduire l'accélération inutile consommant davantage de carburant, et rendre les déplacements à pied et à vélo plus sécuritaires puisque l'attrait envers la voiture se trouve amoindri. Si d'autres mesures sont prises en même temps (apaisement, aménagements cyclables, rétrécissement des voies), le transfert modal de l’automobile vers des modes moins polluants accomplit encore plus notre objectif de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Pour plus de silence

Imaginons une belle soirée d'été où vous voulez vous assoir sur la terrasse d'un restaurant tendance. Vous faites scanner votre passeport vaccinal pour rapidement vous rendre compte qu'il faudra crier pour que la serveuse puisse vous entendre. Peut-être que prendre votre repas pour emporter serait une solution, puisqu'il y a beaucoup de parcs agréables dans le voisinage. En réduisant la vitesse de 50 à 40, on enlève presque trois décibels de bruit à la voiture qui passe. Si on ose abaisser la vitesse à 30 km/h, c'est plutôt 6,4 dB qu'on vient de retrancher. Ça ne parait pas beaucoup, mais dans une grande ville où le silence est impossible à obtenir, toute amélioration serait le bienvenu.

gros panneau max 30 à l'entrée de Lachine
En arrivant à Montréal (Lachine) à partir de Dorval.

Pour plus de liberté

Quoique le mot « libârté » (sic) soit souvent utilisé pour faire avancer des théories douteuses, je parle ici de l’autonomie dont jouissent certains enfants pour marcher vers l'école. C'est la même situation avec ceux et celles habitant des milieux propices à la vie humaine, qui peuvent jouer au hockey sur la chaussée. Depuis 2017, la loi 122 permet aux villes d'autoriser le jeu libre sur certaines rues. Une vitesse moins élevée consiste en une excellente première étape pour rendre cela possible.

Pour en faire un palmarès

panneau maximum 30
  1. Verdun (1979 – à confirmer)
  2. Outremont (2014)
  3. Le Sud-Ouest
  4. Le Plateau-Mont-Royal
  5. Rosemont–La-Petite-Patrie
  6. Lachine
  7. Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce
  8. Ahuntsic-Cartierville
  9. Villeray–Saint-Michel–Parc-Extension
  10. Mercier–Hochelaga-Maisonneuve
  11. Ville-Marie
  12. Montréal-Nord (nouveau)
  13. Rivière-des-Praires–Pointe-aux-Trembles (nouveau)
panneau maximum 40
  1. Anjou
  2. L'Ile-Bizard–Sainte-Geneviève
  3. LaSalle
  4. Pierrefonds-Roxboro
  5. Saint-Laurent
  6. Saint-Léonard

Qu'ont en commun la plupart des juridictions de la première liste? Projet Montréal y est au pouvoir, ou dispose d'une majorité des sièges au conseil.
La deuxième liste énumère les arrondissements n'ayant pas adopté 30 km/h comme maximum permis dans les zones résidentielles. Vous verrez que les châteaux forts de Denis Coderre s'y trouvent.

Pour des artères plus vivables

Après avoir instauré le maximum 30 sur les rues locales, peut-on espérer cette même évolution sur les artères? Heureusement, certains arrondissements avant-gardistes l'ont déjà fait pour les rues collectrices, ce qui est le cas sur Monk, Laurendeau, Jolicœur et Notre-Dame dans Le Sud-Ouest, par exemple. D'autres administrations ont décidé d'imposer le 30 km/h sur les artères devant parcs et écoles, et/ou le 40 km/h ailleurs. Il reste par contre du travail à faire et des mentalités à inculquer avant qu'une vitesse plus humaine devienne une norme sur les grands boulevards de nos villes.

Pour d'autres aménagements

On a beau abaisser la vitesse maximale à 30 km/h partout en ville, mais si la chaussée ressemble davantage à un tuyau à faire passer des voitures, les conducteurs rouleront vite. Prenons l'exemple de la rue Saint-André sur Le Plateau-Mont-Royal. On la visualise ci-dessous avec une large emprise, puis avec du marquage pour canaliser le débit. À ce stade, le projet de vélorue venait d'être créé, et l'étape des aménagements physiques était la dernière à réaliser. On déminéralise pour planter des arbres, puis on installe des délinéateurs au coin de la rue Napoléon pour rendre complexe le transit automobile.
Quoique ce projet ne soit pas parfait — un ou deux autres déviateurs de plus étant nécessaires pour empêcher le transit complètement —, on observe les saillies de trottoir qui donnent un coup de main à la personne âgée pouvant maintenant traverser la rue plus rapidement.

Avant l'apaisement
une rue large sans apaisement retour en arrière, icône inactif avancée vers l'avant
Été 2016
Apaisement avec du marquage
une rue avec des lignes rétrécissant la largeur avec de la penture retour en arrière avancée vers l'avant
Été 2017
Apaisement physique
une rue apaisée avec un obstacle obligeant les voitures à tourner vers la droite retour en arrière avancée vers l'avant, icône inactif
Automne 2020

En résumé, une limite de 30 qui s'applique à tout le réseau résidentiel est souhaitable pour calmer les ardeurs sur la route. Ceci étant dit, les aménagements physiques – dos d'âne, déviateurs, le rétrécissement de la chaussée, bacs de fleurs, etc. – sont toujours requis pour faire respecter cette nouvelle limite plus conviviale... pour les êtres humains!

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